Riverains contre opération immobilière: à propos du jugement du Tribunal administratif de Rennes, réponse au Télégramme

Le sujet du litige porte sur la construction d’un immeuble de 17 logements et 20 parkings, sur 4 niveaux, au cœur d’un îlot constitué d’une trentaine de maisons individuelles. Ce projet enclavé occupe un terrain constitué d’un parc arboré de grande qualité et comporte une sortie en goulot au 11 rue Victor Hugo. Le jugement du Tribunal en faveur de cette opération immobilière ne se base que sur la conformité du projet avec les règles du Plan local d’urbanisme (PLU), sans s’occuper des nuisances apportées au voisinage. Mais surtout, au mépris d’une interprétation qualitative du PLU, il aura pour conséquence d’encourager le grignotage par des opérations spéculatives de tout un quartier dont la valeur patrimoniale reconnue risque ainsi d’être détruite sans retour. A moins que.
D. Grunenwald, Président d’Asso-Cornouaille
à Madame Carole ANDRE, Le Télégramme / édition CONCARNEAU,
le 11 février 2019
Madame,
Vous avez publié dans l’édition de Concarneau du Télégramme parue le 6 février 2019 un article intitulé « Tribunal administratif. Les voisins d’un projet immobilier déboutés ». Vous me permettrez d’apporter quelques précisions et commentaires à votre relation des faits qui m’apparait un peu réductrice. Ce projet immobilier a déjà fait couler beaucoup d’encre, avant même la signature de l’arrêté du 28 juin 2016 du maire de la ville, et plusieurs articles y ont été consacrés dans votre journal. Il a aussi été à l’origine de la constitution d’Asso-Cornouaille, dont l’objet est de s’opposer à la prolifération des immeubles collectifs dans le quartier des plages de Concarneau, et à la disparition des espaces verts au sein de la ville.
Vous ne pouvez ignorer qu’une opposition ferme des habitants du quartier s’était manifestée au printemps 2016, à la suite du dépôt de la demande du permis de construire, et que la pétition d’Asso-Cornouaille avait recueilli près de 2500 signatures. Malgré ce mouvement, le maire de Concarneau a signé le permis de construire en juin 2016, et cette signature a été suivi de plusieurs recours gracieux individuels, Asso Cornouaille, formée trop récemment n’ayant pas la faculté d’intervenir. En l’absence de réponse, deux « voisins » du projet ont formé un recours devant le tribunal administratif. Au cours de l’instruction, la société ACP IMMO a fait une demande de permis rectificatif qui corrigeait une partie des irrégularités de sa première copie, signalées dans le recours. Considérant que la principale critique au projet, à savoir la construction d’un immeuble collectif de 17 logements et de parkings dans ce secteur entièrement pavillonnaire, restait entière, Asso Cornouaille, ainsi que certains riverains agissant en leur nom propre, ont à nouveau formé des recours gracieux contre le permis rectificatif. En l’absence de réponse, les deux plaignants devant le Tribunal administratif, soutenus par un vote unanime de l’assemblée générale d’Asso Cornouaille, ont poursuivi leur action. C’est cette étape de la procédure qui vient d’être jugée, le Tribunal ayant donné au règlement du PLU une interprétation qui demeure contestable.
A ce titre votre article oublie de rappeler que ce jugement est susceptible d’appel devant la Cour Administrative d’Appel de Nantes, et que les parties plaignantes « déboutées » disposent d’un délai de deux mois pour déposer une requête d’appel.
En tout état de cause, le tribunal administratif n’a la possibilité de se prononcer que sur la légalité de la décision du maire d’accorder le permis de construire, sans aucune autre considération.
Mais même s’il devait être considéré par les tribunaux, dans leur interprétation, comme conforme au PLU, il n’en reste pas moins que ce projet immobilier comporte le démantèlement d’une des plus belles propriétés historiques de la ville de Concarneau, et fera disparaître un des plus beaux espaces verts du quartier de la Corniche, qui participe au cadre de vie de ses nombreux habitants riverains et promeneurs.
Cet élément du patrimoine de Concarneau, en outre réservoir urbain de biodiversité et de nature ne bénéficie aujourd’hui d’aucune autre protection que celle que le Maire pourrait lui accorder, en usant de son droit de préemption s’il en avait la volonté. D’ailleurs, il est envisagé d’inclure les parcelles concernées par le projet au sein de la future Aire de Valorisation de l’Architecture et du Patrimoine.
Pourtant, l’argumentation développée par la mairie de Concarneau devant le Tribunal montre bien la volonté manifeste de voir s’étendre la partie la plus urbanisée de Concarneau en grignotant peu à peu le quartier de la Corniche, encore préservé de cette urbanisation dense.
Veuillez croire, Madame, à l’expression de ma considération distinguée.
D. Grunenwald, Président d’Asso-Cornouaille
Pour info:
l’article du Télégramme du 6 février 2019
N.B. Correctif: contrairement à l’affirmation du Télégramme, les plaignants ne sont pas condamnés à verser des frais de justice au promoteur ACP-IMMO mais seulement à la Ville